lundi 31 octobre 2016

(B)reinedead

(on remarquera que cette chronique, après tant de mois de rien, sort pile pour Halloween... si ça c'est pas de la coïncidence ! )

[Pause-lecture] Victoria, Reine et tueuse de Démons, de A. E. Moorat (Queen Victoria : Demon Hunter, 2009) 


Londres, 1838. 
La Reine Victoria est couronnée : elle reçoit l'orbe, le sceptre, et un arsenal d'armes destiné à pourfendre les démons ! Car au palais de Kensington, il y a de nombreux domestiques pour les tâches les plus ingrates, mais il incombe au souverain d'éliminer les engeances des enfers...
Bienvenue dans l'ère victorienne !
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"À une heure avancée de la nuit, alors qu’il contemplait Perkins, son serviteur, en train de manger son chien, Quimby, l’air sombre, se mit à réfléchir aux événements inhabituels survenus dans la soirée. "

   Origine : Royaume-Uni
   Traduction : Carine Roulet (2011)
   Edition : Eclipse (2011)


Victoria. Tueuse. De. Démons. En costume de sacre, avec des armes trop classes et tout plein de têtes décapitées.

Shut up and take my money ! 

Comme beaucoup je suppose (peut-être même comme vous, qui sait ?), j'ai été fortement interpellé par le titre et la couverture lorsque je suis tombé un peu par hasard sur ce livre dans un étal de bouquiniste, alors que j'étais simplement venu à la base pour .... et allez, voilà qu'il nous raconte encore sa vie ... bref, difficile de ne pas étre titillé par un visuel pareil, d'autant que de manière générale, le concept de fantasy/fantastique historique (ce n'est pas tout à fait ça, mais vous saisissez l'idée) m'intéresse énormément. D'autant plus que la thématique zombies/démons impliquait un ton décalé série B assumé, donc une bonne petite lecture décomplexée et pas prise de tête, peut-être même fendarde, bref un machin à des lieues de mes lectures habituelles, en perspective. 
Et en fin de compte, même si c'était un poil différent et en deçà de mes attentes, c'est bel et bien ce que j'ai eu. n'est-ce pas Les Mystères de Saint-Petersbourg (non, je n'arrêterai pas avec celui-ci)

Oui, je spouale la fin de ma chronique dès le début. Oui, je le sais. Oui, je m'en fous. C'est chez moi ici, je fais ce que je veux. Au moins, comme ça, pas de malentendus entre nous, et puis si jamais ça vous saoule, ça vous permet d'arrêter la lecture à tout moment, et ce en commençant tout de même dans les grandes lignes le verdict final. C'est plus pratique comme ça, non ? 

Bon, maintenant que ce mystère a été éclairci, je pense que nous pouvons revenir à des choses plus triviales. 

La couverture reprend ce tableau bien
connu de la reine en costume de sacre
Comme vous avez pu vous en douter au vu du titre, de la couverture, et du petit résumé, le roman met donc en scène cette bonne vieille Victoria (enfin, jeune dans le cas présent) à peine couronnée, et déjà bien occupée...  À l'époque où Elizabeth Bennett poutrait du zombie grâce à ses skills de ninja, et bien avant qu'Abraham Lincoln ne se mette à la chasse aux vampires, la jeune reine avait elle aussi bien des ennuis dans son royaume avec les forces des ténèbres... car ce ne sont rien de moins que des démons venus tout droit des Enfers, qu'elle doit affronter ! Un sombre complot s'ourdit en effet en plein coeur de l'Angleterre, visant à placer les descendants de Baal sur le trône ...
C'est ainsi l'occasion de revisiter les première années de l'ère victorienne sous un angle un peu inédit - et tellement jouissif ! Les lycanthropes déguisés en valets - perruqués et poudrés, s'il vous plaît ! - les prostituées et parlementaires zombies, les armées de petits ramoneurs possédés, se mêlent joyeusement - le plus souvent avec force et fracas - aux grandes figures de l'époque que l'on est amené à croiser au fil des chapitres. De ce côté là, le mélange fonctionne parfaitement, d'autant qu'il est fait avec suffisamment de décalage et de dérision, mais toujours maîtrisé, pour éviter de somber dans le gros n'importe quoi, ou au contraire dans le "trop au sérieux". Et ça, mine de rien, c'est un très bon point. 

J'ai pourtant eu un peu peur au début de ce côté-là, je vous l'avoue, car à un moment, les chapitres de Victoria s'orientaient un peu trop vers son amourette sa relation avec le Prince Albert, et très honnêtement ... Je n'en avais pas grand-chose à faire. En soi, ce n'est pas une mauvaise chose - d'autant que ça représente une part très importante et de la vie de la reine, et de l'intrigue - mais ça empiète à mes yeux un peu trop sur l'aspect guerre contre les démons, côté Victoria. Et puis du coup, elle ne commence à véritablement poutrer du démon que vers la moitié-les deux tiers de l'histoire. Petite déception de ce côté-là, car pour une oeuvre qui s'appelle "Victoria, tueuse de démons", la Victoria, elle n'en chasse pas tellement au final.

Le dieu-démon Baal, dont les descendants
cherchent à asseoir leur domination sur le monde ...
Fort heureusement, il y a Quimby. Le seul, l'unique, le grand Quimby. Qui à lui tout seul représente environ les deux tiers du fun de l'histoire. Pour faire simple, disons que c'est une espèce de noble pervers, légèrement malhonnête sur les bords, et plutôt porté sur la nécromancie... Il forme avec son serviteur Perkins, tout aussi dépravé que le maître - et accessoirement changé en zombie suite à un malheureux concours de circonstances - un drôle de duo auquel j'ai curieusement fini par m'attacher à la suite de toutes ces mésaventures à base de chantage zombies, possédés, et rats sauvages dans lesquelles ils se retrouvent embarqués... Le contraste très amusant entre le caractère immoral des deux hommes et leur attitude exagérément guindée propre à la haute société a dû également beaucoup jouer sur ce ressenti. J'ai été surpris tout de même de voir qu'ils étaient aussi présents, mais leur présence permet d'alléger grandement le ton du récit, en apportant beaucoup d'humour au récit. Bon, pas toujours très fin hélas, ça tourne souvent autour de la ceinture, avant comme arrière, si vous voyez ce que je veux dire ... *clind'oeilclind'oeil* (bons dieux que je suis ridicule...)

Par ailleurs, les autres personnages tiennent bien la route, entre la badass Maggie Brown, mentor et protectrice de la reine, le bienveillant et attachant Lord Melbourne, Premier Ministre du Royaume, et le détestable sir John Conroy, odieux manipulateur de l'ombre ... L'intrigue offre de nombreux rebondissements, et nous entraîne dans une aventure haute en couleurs, nous faisant visiter les Palais de Kensington et Buckingham, les fameux clubs de gentlemen de Londres, la Chambre des Lords, les bas-fonds de la ville, sans oublier bien sûr, détour obligé par les asiles glauques de l'époque... Le tout avec moultes scènes d'action, bien riches en hémoglobine, des combats effrennés contre des hordes de revenants ou de lycanthropes, des duels à l'arc, à l'épée, ou encore à l'aide d'armes plus... inédites... Bref, les décors et situations sont assez variés, nous offrant un bel aperçu du Londres de l'époque victorienne, mais version histoire d'horreur-série B... 
Sinon, rien d'exceptionnel dans la plume et la narration, mais le tout est suffisamment maîtrisé pour que ça se lise facilement et rapidement, sans prise de tête, en gardant un bon rythme du début à la fin. Peut-être un peu trop survolé par moments: quelques descriptions, et développements supplémentaires n'auraient pas été de trop, notamment du côté de Victoria et des démons, pour pousser le concept un peu plus loin, d'autant que certains éléments restent encore en suspens à la fin ... 


Bref, un bon petit roman d'horreur historique au ton décalé un peu série B parfaitement assumé, qui offre sans prétention ce qu'il promet, avec un concept qui méritait toutefois d'être poussé un peu plus loin. La partie romantique côté Victoria empiète malheureusement un peu trop sur d'autres développements, et l'humour souvent coïto-scato est loin d'être toujours très fin; cependant rien qui vienne gâcher outre mesure la lecture. Rien d'inoubliable dans ce "Victoria, reine et tueuse de démons" finalement, mais ça reste très plaisant , jouissif même, comme défouloir littéraire, pour passer le temps entre deux lectures moins légères. 

Victoria se doutait-elle que, quelques décennies plus tard, une nouvelle catastrophe s'abattrait sur son royaume ?
(The new adventures of Queen Victoria, par Pab Sungenis - allez voir, c'est rigolo.)

3 commentaires:

  1. Autre coïncidence : le livre que j'ai fini juste (enfin il y a 2 jours) avant de lire cette chronique avait pour postulat de base "Dracula a épousé Victoria"... Doit-on voir une influence démoniaque dans tous ces recoupements ?

    Sinon, je veux bien que tu racontes ta vie : je suis frustrée de ne pas savoir pourquoi tu étais rentré chez ce bouquiniste.

    Bon début de soirée :)

    PS : j'allais oublier : il a l'air sympa ce bouquin, je le note dans un coin.

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    1. Il s'agit de "Anno Dracula", n'est-ce pas ? Il est dans ma PAL également, et dans ma bibliothèque surtout, attendant patiemment d'être ouvert... (et en attendant, il me surveille juste de manière glauque pendant que je dors, tel un autre fameux vampire que nous n'oserons pas citer ici) Effectivement, drôle de coïncidence... Les forces du Mal essaieraient-elles de nous dire quelque chose ?
      Je suis curieux de connaître ton avis sur ce livre, en tout cas !

      Pour l'instant "racontage de vie" (ce que je fais peut-être de mieux, et le plus souvent sur ce blog, le plus souvent sans le faire exprès...) je t'avoue que ça fait un petit bout de temps maintenant, mais je suppose que j'y étais tout simplement allé en flânant un peu dans Lille, avant mon déménagement pour Lyon... En fait, à la Vieille Bourse, il y a pas mal de bouquinistes, j'y étais souvent passé, mais je ne m'y étais jamais arrêté, donc c'était l'occasion, tout simplement. :)

      Merci à toi d'être passée en tout cas, et bonne continuation !

      (Réponse deux semaines plus tard, désolé, mais que veux-tu, on ne change pas facilement ses vieilles habitudes !)

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    2. Ouaip, c'est ça.
      Pour ma part, j'ai adoré les ouat'mille références, même si ça a un peu ralenti mon rythme de lecture, à chercher sur le ouéb si tel ou tel nom avait une signification ^^. "Ah tiens, Machin c'est un policer qui a participé à l'enquête sur Jack l'éventreur", "Donc Bidule c'est un perso de tel roman, ok". J'ai assez vite arrêté de vouloir capter toutes les références, ça devenait pénible ^^.
      Dans mon édition (Livre de Poche, avec la jolie couv' et le dos rouge), il y a pas mal de bonus à la fin, qui m'ont permis de quitter l'histoire et les persos en douceur et de satisfaire ma curiosité. L'auteur explique quelques références, il y a une fin alternative, etc.
      L'écriture est fluide et les héros sont attachants.
      Par contre, Dracula et Victoria sont en arrière-plan dans presque tout le roman, on en parle plus qu'on ne les voit (moi ça ne m'a pas gênée, mais j'te préviens).
      → au final, j'ai trouvé ça très chouette et j'ai demandé le tome 2 pour mon anniv'. En plus j'avais lu Dracula juste avant, du coup ça amélioré mon expérience de lecture (j'ai retrouvé des persos, des événements).

      À ta place je ferais gaffe, avec les jours qui raccourcissent, Anno Dracula risque d'être plus fort (ou en tout cas moins gêné par le soleil)... Sois prudent !

      (réponse un jour plus tard, je n'ai pas procrastiné pour une fois :p)

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