lundi 26 février 2018

Japon à vapeur


[Pause-lecture] La Guerre du Lotus, tome 1 : Stormdancer, de Jay Kristoff (Lotus War : Stormdancer, 2012)

On disait éteinte la race des griffons, ces créatures mythiques menées par les danseurs d'orage. Pourtant, Yukiko et son père reçoivent l'ordre d'en capturer un pour le cruel shogun des îles de Shima. Contre toute attente, ils y parviennent, mais Yukiko se retrouve perdue dans une forêt sauvage, avec pour seule compagnie un griffon mutilé qu'elle nomme Buruu. Unis dans l'adversité, la jeune fille et l'animal s'entraident. Yukiko serait-elle la véritable danseuse d'orage, ultime espoir du peuple ?
Les contes disaient que leurs ailes produisaient le bruit du tonnerre, et que les éclairs étaient les étincelles que faisaient leurs serres lorsqu'ils combattaient dans les cieux. La pluie était les larmes de Susano-o, le dieu des tempêtes, bouleversé par la beauté et la férocité de ses petits-enfants. Tigre de tonnerre. Arashitora. "
    Origine : Australie
   Traduction : Emmanuelle Casse-Castric (2014)
   Edition : Bragelonne (2014)




« Comment ? Un roman de steampunk japonais, des créatures mythiques, une rébellion du peuple et une héroïne forte ? Vous m'avez eu à steampunk japonais. Ça m'a suffi ! » nous explique Patrick Rothfuss sur la quatrième de couverture (pour les lecteurs qui ne le savent pas, ce charmant monsieur - dont la barbe ferait pâlir Gloïn d'envie - est l'auteur entre autres du Nom du Vent). Hé bien pour moi, c'est pareil. C'est limite si ça ne m'a pas suffi pour sauter sur la série dès qu'elle est apparue dans les rayonnages de ma bibliothèque habituelle ! Il faut dire que le steampunk à thème extrême-oriental, ça ne court pas forcément les rues - la majorité des oeuvres restent surtout sur de l'inspiration victorienne - aussi je me suis facilement laissé tenter, histoire de voir ce que Jay Kristoff avait à nous proposer.

Une jolie couverture alternative (une 1ere version non retenue)
signée Jason Chan - vous connaissez forcément son travail
si vous lisez régulièrement du YA ou si vous êtes un gamer
 
J'avoue que j'ai un peu de mal à comprendre les critiques au sujet de la trop «grande richesse» supposée de l'intro qui a apparemment perdu pas mal de lecteurs... J'ai au contraire trouvé cette première partie comme étant la plus intéressante, avec la découverte de l'univers et de ses spécificités. Un univers assez déprimant, finalement, le développement de l'industrie ayant plongé le pays dans la pollution, la guerre et la destruction de la végétation... On a également un mélange d'époques entre un Japon féodal type ère Tokugawa, et une industrialisation type ère Meiji, avec en plus la guerre à l'étranger et les idéaux suprémacistes qui ne sont pas sans rappeler le Japon de la première moitié du XXe siècle ... sans oublier la présence de yokais, onis et créatures mythologies en tout genre qui se baladent en liberté - des samurais à katana-tronçonneuses côtoient ainsi machines à vapeur et démons... (en gros, si ça ne vous parle pas, imaginez un Saint-Empire Romain Germanique au XVIe version fantasy, avec une technologie du XIXe et des zeppelins partout, et à sa tête un Charles Quint braillard en armure mécanique qui voudrait chasser les juifs, les bolchéviques, après avoir envahi la Pologne, tandis que des gobelins venus de l”enfer ravagent ce qui reste des terres. Voilà, tout ça, mais version nippone.) Bien sûr, vous imaginez bien que l'univers utilise beaucoup de concepts et d'éléments propres au Pays du Soleil-levant (la mythologie, les armes, les grades et les titres honorifiques, l'habillement, certaines expressions, etc.), et ce dès le début de l'aventure, c'est peut-être ce qui a pu donner à certains l'impression d'être balancés sans préavis dans un univers auquel ils ne comprenaient rien. Mais personnellement, ce soi-disant  «manque de repères» ne m'a pas dérangé, au contraire ; bien sûr, il faut être un peu au fait de l'Histoire et de la culture nippones, sur lesquelles se base donc le monde de la série, mais cela a contribué pour moi à plonger tout de suite dans l'aventure - ce que la présence de trop nombreuses descriptions aurait peut-être pu empêcher - sachant qu'au pire, pour les plus perdus, un lexique est disponible en fin de volume.


A savoir justement - et peut-être malheureusement aussi, quelque part - que cet univers assez original, mêlant Japon féodal, créatures légendaires et steampunk, est ce que j'ai trouvé de plus intéressant dans Stormdancer... et je ne peux malheureusement pas en dire autant de l'histoire. Il y a de bons moments bien sûrs, de l'action, de l'humour, de l'amour, des rebondissements, tout ce que vous voulez... Mais passée la première partie, finalement, tout devient assez classique, et j'avais sans peine rapidement deviné à trente lieues quasiment tout le schéma de l'intrigue, y compris certains retournements de situation. Bref, histoire sans réelle surprise, c'est dommage. A vrai dire, je pense même entrevoir pour la suite une intrigue amoureuse qui ne plaît guère (avec ce vil margoulin d'Isao) ... A espérer que j'aie tort sur ce point...*

(*) (il s'avérera après coup qu'effectivement, là-dessus, je m'étais trompé, et fort heureusement d'ailleurs)

L'archipel de Shima
En outre, exceptés le petit Kin et Kasumi, qui n'apparaissent finalement pas des masses, je ne me suis finalement pas tant attaché aux personnage spoual/20 (en plus pour Kasumi... ben c'est mort, maintenant...) spoual/20 il y a bien Aïsha qui a su tirer son épingle du jeu, mais un peu tard. Oui même Yukiko et son nouveau bff Bourou le Griffon, je les ai trouvés sympatoches, mais sans plus, parfois même un peu casse-tagnettes. La jeune fille fait le taf en tant qu'héroïne, c'est certain, mais je ne sais pas... il lui manquait un petit quelque chose. Et puis bon, sa relation amoureuse d'ado avec son bô samouraille... je m'en calissais un peu en fait. spoual/20 La trahison de celui-ci à la fin ne m'a même pas tant surpris que ça en plus, ni choqué, ni chagriné, cf un peu plus haut sur l'intrigue prévisible, on le sentait venir à des kilomètres... spoual/20 Idem pour la relation Buruu-Yukiko, j'ai trouvé qu'on passait un petit peu vite du stade "Grouarf!! Yiiak!! Yiiik!!" (je vais tous vous buter sales humains!!!, en griffon, ndt) à "Yukiko t ma bff, on se kompran tro, vazy je pouré mourir pour toi ma seure!!!<3" Bon en vrai, je suis un peu méchant, ils ont une belle relation tous les deux, c'est sûr, mais peut-être trop fusionnelle trop rapidement, du coup l'alchimie a pour moi eu un peu de mal à passer, comme un bon gâteau qu'on a pas le temps d'apprécier parce qu'on l'a avalé trop vite. D'autant que c'est supposé être le point central de ce premier tome, ça aurait mérité un peu plus de soin. Dommage !

Globalement, ça résume bien l'impression générale que j”ai eu de ce premier tome : une très bonne base (l'univers) mais un traitement sans grande originalité (pour ne pas dire sans prise de risque) et des personnages sympathiques, mais qui auraient mérité un meilleur traitement. Bref, un bon moment de lecture, mais je m'attendais à mieux.

Au final, ce n'est certes pas le coup de coeur auquel je m'attendais, je suis resté un peu sur ma faim : l'univers développé est à la fois original et captivant, mais j'ai malheureusement trouvé la trame un peu classique, avec certaines grosses ficelles visibles à des kilomètres... Je pense d'ailleurs entrevoir certains éléments pour la suite qui ne me plaisent guère... Mais si je n'ai pas totalement été captivé par l'intrigue et les personnages, ce fut néanmoins une lecture assez plaisante ! A espérer toutefois que la suite prenne plus de risques au niveau de l'intrigue, et creuse davantage ses personnages - les principaux notamment.