1633, sous le règne de Louis XIII. Le cardinal de Richelieu veille à la bonne marche du royaume de France, de plus en plus menacé par l'Espagne et ses nouveaux alliés: les dragons. Or, à situation exceptionnelle, moyens exceptionnels: le Cardinal se voit contraint de faire appel à une compagnie d'élite qu'il avait lui-même dissoute. Sous le commandement du capitaine La Fargue, les bretteurs les plus vaillants et les plus intrépides que possède le royaume sont ainsi réunis pour former à nouveau les redoutables Lames du Cardinal.
Je le dis sans honte, je suis tombé dans le piège de la belle édition - je ne pense pas être le seul, d'ailleurs. En l'occurence, on tient là un beau spécimen, qui a le chic pour vous mettre dans l'ambiance avant même de l'avoir acheté. Regardez-moi cette couverture, façon détournement de tableau baroque, qui est juste magnifique... Il y a même de fausses craquelures, c'est dire si c'est pas du beau boulot! Par dessus tout, il nous ont ajouté une jolie jaquette parcheminée avec un plan du vieux Paris en fond, ils ont choisi une jolie police d'écriture, et les lettres sur la tranche et la couverture sont en relief! Ben moi, j'appelle ça du beau boulot. Un beau piège à lecteur. Alors moi je passe, tranquillement, histoire de voir s'ils n'ont pas du Terry Pratchett que je n'aurais pas déjà lu et là, PAF!
... non, ça ne fait pas de chocapics.
... et donc, je tombe là-dessus. Qu'est-ce que vous vouliez que je fasse d'autre, monsieur le Juge? Il me regardait, avec sa belle couverture implorante, et son résumé alléchant... Alors forcément, je l'ai pris - avec un voisin Pratchettien, cela va sans dire, mais ceci est une autre histoire.
Comme vous l'aurez sans doute deviné, Pierre Pevel puise son inspiration entre autres chez Dumas, pour nous livrer ce premier tome d'une trilogie éponyme mêlant fantasy et roman de Cape et d'Epée. Personnellement, je ne suis pas très familier avec ce type d'oeuvres - même si j'adore "Le Scorpion" et "De Cape et de Crocs" - c'est plutôt l'aspect "roman historique" qui m'avait intéressé. (Et oui, les dragons aussi. Mais pas que.) De ce côté-là, je suis plutôt satisfait de cette lecture: le style de l'auteur, simple mais efficace, nous transporte agréablement dans cette France du début du XVIIe, à l'aide de quelques descriptions discrètes et de nombreux détails. On a même parfois droit de la part de l'auteur à une petite leçon d'Histoire, sur le Palais-Cardinal, les faubourgs de Paris... Fort heureusement, tout cela est parfaitement distillé, et ne vient jamais gâcher la lecture ou interrompre le récit trop longtemps - on n'est pas non plus chez Zola, ici. Non, on a juste de quoi visualiser ce Paris du XVIIe, son ambiance, sa vie grouillante, ce que l'auteur parvient à rendre avec justesse. Une carte est d'ailleurs présente en début de tome pour aider le lecteur à se situer, bonne initiative de la part de l'éditeur (de l'auteur?).*
Bref, on prend un réel plaisir à se promener en ville aux côtés des personnages.
Le mot de la fin:
Si ce premier tome fut une lecture agréable, je n'ai pas non plus été totalement transporté. Si le récit est plutôt rythmé et globalement maîtrisé, avec des personnages charismatiques et un univers intéressant, il subsiste néanmoins des défauts qui le rendent un peu inégal. De plus, malgré les qualités que je lui trouve, le style de l'auteur ne m'a pas emballé plus que ça. Cela ne m'empêchera cependant pas de lire la suite (sans doute pas avant un moment, toutefois) ce qui a été grandement influencé par les retournements de situation finaux.
Allez, ça reste quand même un bel hommage à l'oeuvre du "Père Alexandre", et les amoureux des Mousquetaires devraient y trouver leur compte. Disons que je lui décerne une Rapière d'Or, un prix à cent pour cent made in moi-même!
L'ancien Palais-Cardinal, aujourd'hui le Palais-Royal,
que Richelieu fit construire en 1628, théâtre de nombreuses intrigues.
Puisqu'on parle des personnages (notez la transition) on a affaire ici à un joli petit groupe de têtes ma foi fort sympathiques. Pas un héros, mais tout un groupe, les fameuses "Lames", chacun ayant sa personnalité et son histoire propres, qui sont malheureusement encore trop survolées dans ce premier tome. Aucun n'est vraiment davantage mis en avant que les autres, ce qui est une bonne chose - il n'y a rien de plus exaspérant que de voir un personnage que l'on trouve insupportable prendre la vedette - et chacun aura son moment de gloire. J'ai tout de même l'impression que l'auteur éprouve une sympathie particulière à l'égard de Marciac, le bellâtre coureur de jupons de la bande, avec lequel j'ai parfois un peu de mal** bien qu'il reste tout de même assez sympathique pour ne pas être à mes yeux entièrement détestable. Je regrette également qu'Almadès, le maître d'armes espagnol, se montre si effacé - alors qu'il avait tant de potentiel!
Davantage de scènes où les Lames sont réunies n'auraient pas non plus été de trop. Peut-être enfin leur manque-t-il une touche de profondeur, pour qu'on réussisse vraiment à s'attacher à eux. Sans doute aurait-il donc fallu allonger un peu le récit, où réduire le nombre, assez élevé, de personnages présentés dans ce premier opus. Ces scènes de groupe, si elles avaient été plus nombreuses, auraient pu être l'occasion de les développer davantage, d'autant que certains paraissent finalement plus être des archétypes qu'autre chose. Non et puis, par moments, j'ai vraiment eu l'impression de voir des attitudes, des façons d'agir, des répliques clichées, vues mille fois ailleurs, aussi bien dans les livres qu'au cinéma, d'ailleurs. Dommage!
Mais globalement, malgré ces quelques points, les personnages restent assez réussis, étant même une des forces de ce premier opus. Personnellement, j'aime beaucoup le mystérieux Saint-Lucq, et surtout le Cardinal - qui a un petit côté "Patricien Vétérini", ce qui n'est pas pour me déplaire. Les personnages féminins, Agnès en tête, ne se laissent pas marcher sur les pieds, et parviennent facilement à tenir tête aux mâles forts et courageux. Les "méchants" non plus ne sont pas en reste, avec à leur tête un excellent duo très charismatique, formé de la belle vicomtesse de Malicorne, dragonne à l'apparence trompeuse, et de son bras droit-ami le marquis de Gagnière. Très sincèrement, les scènes entre ces deux personnages sont tout simplement jouissives. J'ai d'ailleurs trouvé dommage que la conclusion de ce tome semble apparemment mettre en péril le devenir de cet excellent couple. Sans trop spoiler, disons qu'au vu de la conclusion, il est probable que les principaux antagonistes des tomes suivants soient surtout des nouvelles têtes.
Cette conclusion réserve d'ailleurs quelques - autres - surprises, en plus d'être bourrée d'action. Les évènements s'enchaînent à toute vitesse, là où le reste du récit avance tranquille-pépère, présente beaucoup de choses et ouvre beaucoup de portes, sans toutes les refermer. L'intrigue prend donc son temps pour se mettre en place, et ne démarre véritablement qu'à partir de la seconde partie, à 150 pages sur 400, donc, lorsque les Lames commencent seulement à se réunir. Ainsi, tout au long du récit, on sent bien qu'on n'a affaire qu'au premier tome de cette trilogie, ce qui lui confère par moments un côté "Introduction à la série" - bien qu'il soit évidemment possible de le lire de manière indépendante.
Je reste en outre un peu dubitatif quant à la façon dont est tournée la conclusion: pour moi elle déteint un peu avec le ton adopté lors du récit. En soi, ce n'est pas une mauvaise chose, mais j'ai eu l'impression que les éléments se précipitaient plus par nécessité, parce qu'il fallait bien qu'on termine le tome sur un moment épique, que par un véritable enchaînement naturel des choses. Ce qui rend l'apparente séparation du couple Gagnières-Malicorne d'autant plus frustrante, étant donné que leurs projets semblent déjoués avec un peu trop de facilité, sans réelle opposition, et surtout sans que personne ne l'aie vraiment vu venir, lecteur y compris.
Davantage de scènes où les Lames sont réunies n'auraient pas non plus été de trop. Peut-être enfin leur manque-t-il une touche de profondeur, pour qu'on réussisse vraiment à s'attacher à eux. Sans doute aurait-il donc fallu allonger un peu le récit, où réduire le nombre, assez élevé, de personnages présentés dans ce premier opus. Ces scènes de groupe, si elles avaient été plus nombreuses, auraient pu être l'occasion de les développer davantage, d'autant que certains paraissent finalement plus être des archétypes qu'autre chose. Non et puis, par moments, j'ai vraiment eu l'impression de voir des attitudes, des façons d'agir, des répliques clichées, vues mille fois ailleurs, aussi bien dans les livres qu'au cinéma, d'ailleurs. Dommage!
La couverture de l'édition Bragelonne. Plusieurs Lames manquent à l'appel,
dont - entre autres - Almadès. Le pauvre n'a décidemment pas de chance...
Cette conclusion réserve d'ailleurs quelques - autres - surprises, en plus d'être bourrée d'action. Les évènements s'enchaînent à toute vitesse, là où le reste du récit avance tranquille-pépère, présente beaucoup de choses et ouvre beaucoup de portes, sans toutes les refermer. L'intrigue prend donc son temps pour se mettre en place, et ne démarre véritablement qu'à partir de la seconde partie, à 150 pages sur 400, donc, lorsque les Lames commencent seulement à se réunir. Ainsi, tout au long du récit, on sent bien qu'on n'a affaire qu'au premier tome de cette trilogie, ce qui lui confère par moments un côté "Introduction à la série" - bien qu'il soit évidemment possible de le lire de manière indépendante.
Je reste en outre un peu dubitatif quant à la façon dont est tournée la conclusion: pour moi elle déteint un peu avec le ton adopté lors du récit. En soi, ce n'est pas une mauvaise chose, mais j'ai eu l'impression que les éléments se précipitaient plus par nécessité, parce qu'il fallait bien qu'on termine le tome sur un moment épique, que par un véritable enchaînement naturel des choses. Ce qui rend l'apparente séparation du couple Gagnières-Malicorne d'autant plus frustrante, étant donné que leurs projets semblent déjoués avec un peu trop de facilité, sans réelle opposition, et surtout sans que personne ne l'aie vraiment vu venir, lecteur y compris.
Reste que globalement, l'intrigue reste plutôt maîtrisée, de bout en bout, jusqu'au retournement de situation final, qui donne vraiment envie de lire la suite pour en savoir plus. Quant aux dragons, l'élément fantastique, je les ai trouvés intégré de façon assez naturelle au récit, faisant partie intégrante de l'univers. Il se sont pour le moment fait plutôt discrets, mais nul doute qu'il prendront plus d'importance lors des tomes suivants!
Durant ma lecture, je m'imaginais Savelda, un sale type à la solde de la Loge Draconnique,
en David Suchet version "Going Postal", le haut-de-forme en moins. Allez savoir pourquoi.
Les "pluches" du récit:
→ Le groupe de héros
→ Les méchants
→ Richelieu
→ Les dragons, discrets mais bien intégrés à l'univers
→ Niveau roman historique, ça se tient
→ Une bonne alchimie fantasy-cape et épée
→ Des moments héroïques et épiques
→ Les retournements de situation
→ Un style efficace, facile et rapide à lire.
→ Un univers intéressant
→ Le groupe de héros
→ Les méchants
→ Richelieu
→ Les dragons, discrets mais bien intégrés à l'univers
→ Niveau roman historique, ça se tient
→ Une bonne alchimie fantasy-cape et épée
→ Des moments héroïques et épiques
→ Les retournements de situation
→ Un style efficace, facile et rapide à lire.
→ Un univers intéressant
Les "oui mais non" du récit:
→ Un style qui ne m'a pourtant pas vraiment conquis
→ Pas mal de clichés
→ Un côté un peu trop "introduction"
→ Une conclusion qui semble un peu forcée et expéditive
→ Pas suffisamment de scènes de groupe
→ Pas assez de profondeur dans certains des personnages.
→ Un style qui ne m'a pourtant pas vraiment conquis
→ Pas mal de clichés
→ Un côté un peu trop "introduction"
→ Une conclusion qui semble un peu forcée et expéditive
→ Pas suffisamment de scènes de groupe
→ Pas assez de profondeur dans certains des personnages.
Le mot de la fin:
Si ce premier tome fut une lecture agréable, je n'ai pas non plus été totalement transporté. Si le récit est plutôt rythmé et globalement maîtrisé, avec des personnages charismatiques et un univers intéressant, il subsiste néanmoins des défauts qui le rendent un peu inégal. De plus, malgré les qualités que je lui trouve, le style de l'auteur ne m'a pas emballé plus que ça. Cela ne m'empêchera cependant pas de lire la suite (sans doute pas avant un moment, toutefois) ce qui a été grandement influencé par les retournements de situation finaux.
Allez, ça reste quand même un bel hommage à l'oeuvre du "Père Alexandre", et les amoureux des Mousquetaires devraient y trouver leur compte. Disons que je lui décerne une Rapière d'Or, un prix à cent pour cent made in moi-même!
"Le cardinal de Richelieu au siège de La Rochelle", de Paul-Henri Motte (1881).
Si historiquement, ce siège (1627-1628) fut une victoire pour l'Armée Royale de France,
Pierre Pevel propose une version toute différente des évènements...
__________________________
(*) On regrettera juste que les noms des principaux faubourgs et artères ne soient pas indiqués; pour des gens comme moi ne vivant pas sur la capitale, c'est parfois un peu gênant, bien qu'on parvienne malgré tout à s'y retrouver.
(**) Remarquez, c'est plutôt ce type de personnages que celui-ci en particulier qui m'insupporte.
(**) Remarquez, c'est plutôt ce type de personnages que celui-ci en particulier qui m'insupporte.
perso, j'ai adoré cette saga qui fut un coup de coeur, j'espère que la suite te plaira ;)
RépondreSupprimerMerci d'être passée! ;)
SupprimerOui, j'espère aussi, après tout j'avais plutôt apprécié ce premier tome, même s'il n'était pas totalement à la hauteur de mes attentes. Et puis maintenant que les personnages ont été introduits, on pourra entrer plus rapidement dans le vif du sujet! :)
(et puis de toute manière, rien que pour l'objet en lui-même, je pense qu'il me plaira; cette édition est tellement belle...)
Ce premier tome était un réel coup de coeur, mais je dois avouer que sur le long terme j'ai beaucoup eu de mal avec cette absence de profondeur des personnages. On a l'impression de survoler tout ce qu'il se passe, j'ai adoré et en même temps j'avais trop l'impression d'être exclue des événements. Et puis, après une discussion avec l'auteur qui est complètement imbu de lui-même, c'est vrai que je remarque de plus en plus de défauts dans ses oeuvres. As-tu lu Haut-Royaume ? :)
RépondreSupprimerOui, une espèce de détachement vis-à-vis des personnages, c'est un peu ce que j'avais ressenti à cette lecture! ('fin, sauf les méchants, mais eux, ils ont la classe.) Dommage si ça s'étale aussi sur les tomes suivants... mais bon, ça ne m'empêchera pas pour autant de les lire! :)
SupprimerAh non, "Haut-Royaume", je n'y ai pas encore touché. A vrai dire, "Les Lames du Cardinal" est le seul bouquin du bonhomme que j'ai lu jusqu'à présent! :)